Une pile de sous au bord d'une table sur laquelle grimpe des hommes d'affaire qui ont posé une échelle contre.
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Selon l’étude, menée par l’autorité de régulation financière britannique, la Financial Conduct Authority (FCA), les négociateurs à haute fréquence gagnent près de 5 milliards de dollars (G$) par an sur les marchés boursiers mondiaux en négociant des actions à des prix légèrement dépassés, imposant une taxe faible mais significative aux investisseurs, résume un article du Wall Street Journal.

L’étude de la FCA met en lumière les effets d’une pratique controversée appelée l’« arbitrage de latence ». L’arbitrage de latence fait partie des pratiques commerciales employées par certains négociateurs à haute fréquence pour réaliser des profits, presque sans risque, au détriment des investisseurs. Les négociateurs cherchent ainsi à réagir plus rapidement que les investisseurs aux informations nouvelles et en mouvement sur le marché imposant ainsi d’infimes différences de prix des actions entre les différentes bourses.

Parmi ces informations récoltées, il y a les nouvelles liées aux entreprises, les données économiques et les fluctuations de prix sur d’autres actions ou marchés. Pour récolter ces informations, les sociétés de commerce électronique investissent dans des technologies sophistiquées qui leur permettent de traiter ces données et d’exécuter des transactions en quelques millionièmes de seconde.

Nombre d’experts estiment que l’arbitrage de latence augmente les coûts pour les investisseurs en rendant tous les acteurs du marché moins susceptibles d’afficher des prix compétitifs pour les actions. Ainsi, les investisseurs obtiennent des prix légèrement plus bas lorsqu’ils achètent ou vendent des actions, selon les négociateurs.

Une taxe minime, mais significative

L’étude de la Financial Conduct Authority calcule que l’arbitrage de latence instaure une « taxe » s’élevant à 0,0042 % du volume quotidien des transactions boursières. Pour obtenir ce chiffre, les auteurs ont analysé deux mois d’activité à la Bourse de Londres en 2015.

Bien que ce chiffre paraisse risible, les auteurs de l’étude affirment qu’il s’additionne. Si les arbitres de la latence avaient fait des profits similaires ailleurs, ils auraient gagné 4,8 G$ sur les bourses du monde entier en 2018, dont 2,8 G$ sur les bourses américaines, selon l’étude de la FCA.

L’impact de cet arbitrage de latence est mal réparti. Les grands investisseurs sont ainsi les plus impactés.

« La taxe d’arbitrage de latence semble suffisamment petite pour que les ménages ordinaires n’aient pas à s’en soucier dans le cadre de leurs décisions de retraite et d’épargne, ont-ils écrit. Pourtant, dans le même temps, une conception défectueuse du marché augmente considérablement les coûts de transaction des grands investisseurs et génère des milliards de dollars de bénéfices par an pour un petit nombre de sociétés ayant recours aux transactions à haute fréquence et d’autres parties dans cette course de vitesse, qui ont alors une incitation importante à préserver le statu quo ».

Une raison politique derrière l’étude?

Les partisans des transactions à haute fréquence contestent les résultats de l’étude et y perçoivent une volonté politique.

« De nombreux universitaires ont démystifié le mythe de l’arbitrage de latence et ce document semble avoir un programme politique », a déclaré Kirsten Wegner, directrice générale de la Modern Markets Initiative, un groupe de pression américain pour les sociétés de transactions à haute fréquence.

Plusieurs politiciens, dont Bernie Sanders et Elizabeth Warren, font effectivement pression pour instaurer une taxe sur les transactions financières qui permettrait de freiner en partie les transactions à haute fréquence, par exemple en introduisant des délais d’une fraction de seconde avant les transactions.

Kirsten Wegner met également de l’avant le fait que la négociation automatisée a permis de réduire le coût des transactions boursières. Elle critique également le fait que l’étude s’est appuyée sur un ensemble restreint de données portant sur le commerce au Royaume-Uni.

Un porte-parole de la Financial Conduct Authority nie toutefois ces allégations. Il affirme que l’ensemble restreint de données s’explique par le manque de disponibilité de données précises sur les bénéfices de l’arbitrage en raison de la nature opaque de la plupart des sociétés de transactions à haute fréquence.