Cet article date de plus de trois ans.

Ma ville demain. La gratuité des transports en commun : une fausse bonne idée ?

À quoi va ressembler ma ville demain. On en parle tous les week-ends cet été sur franceinfo. Aujourd'hui gros plan sur la gratuité des transports en commun, avec Cécile Maisonneuve. 

Article rédigé par franceinfo, Edouard Marguier - Cécile Maisonneuve
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Depuis septembre 2018, Dunkerque (Nord) est la plus grande ville française a proposé un réseau de bus gratuits. (PHILIPPE HUGUEN / AFP)

Dans Ma ville demain, Cécile Maisonneuve, présidente de la Fabrique de la Cité depuis 2015, un think tank sur les innovations urbaines, répond cet été à nos questions sur le devenir de nos cités après la crise sanitaire du coronavirus et le confinement. Les transports en commun gratuits : il en a été beaucoup question pendant la campagne des municipales. 

franceinfo : Pourra-t-on monter dans un bus ou un métro sans rien payer ?  

Cécile Maisonneuve : Oui, la gratuité des transports a été un des sujets phares de la campagne parce qu’on y voit une manière de convaincre les automobilistes d’abandonner leur voiture. Ça paraît simple, de bon sens. C’est pourtant la fausse bonne idée par excellence. D’abord parce que rendre un transport gratuit ne fait pas disparaître son coût. Il faut toujours entretenir le matériel, payer les conducteurs, l’essence ou l’électricité. Bref, il faut bien que quelqu’un paye.

Aujourd’hui, les usagers ne payent que 17% en moyenne du coût réel de leur trajet. Ce chiffre varie d’une ville à l’autre : à Lyon, ce chiffre monte à 60%. Dans certaines villes, qui ont choisi la gratuité, comme Dunkerque ou Niort, c’est 0%.  

Précisément, dans ces villes qui pratiquent la gratuité, quel est le retour d’expérience : est-ce que ça marche ?  

À Niort, la gratuité a été rendue possible parce que la ville abrite de nombreux sièges de compagnies d’assurance : ce que les usagers ne payent plus, ce sont les entreprises qui le font à travers le versement mobilité. La mesure a-t-elle favorisé l’usage des transports en commun ? Oui, mais assez peu parce que la décision de gratuité s’est accompagnée d’une réduction de l’offre de transports collectifs.

À Dunkerque au contraire, la fréquentation a explosé : depuis la mise en place de la mesure en septembre 2018, la fréquentation des bus de la Communauté urbaine a augmenté de 65% en semaine et de 125% les week-ends !  

Donc mission accomplie : les bus se sont remplis et les voitures se sont vidées ?  

Pas vraiment. C’est là que le bât blesse. Ce qu’on a vu en France ou ailleurs - je pense par exemple à Austin, au Texas - c’est que les nouveaux convertis aux transports en commun sont minoritairement des automobilistes, surtout des piétons ou des cyclistes. On n’a donc à peine vidé les voitures mais surtout vidé les trottoirs et les pistes cyclables, ce qui n’était pas franchement l’idée.

Pour vraiment modifier les habitudes, la gratuité doit faire partie d’un ensemble de mesures plus larges. Regardez le Luxembourg, où, depuis quelques mois, tous les TC sont gratuits. En parallèle, 3,2 milliards d’euros vont être investis pour améliorer la capacité du réseau ferroviaire, celle de ses parcs relais et développer son réseau de pistes cyclables et le covoiturage.

Construire le système de mobilité des villes du XXIe siècle coûte cher. Pas sûr que ce soit le moment de se priver de recettes !   

Cécile Maisonneuve

à franceinfo

Consultez lamétéo
avec
voir les prévisions

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.