Menu Close
Diana Ross monte sur un char lors de la 92e parade annuelle de l’Action de grâce du magasin Macy’s dans les rues de Manhattan en 2018. Shutterstock

Le mouvement #advancedstyle célèbre l’élégance des femmes âgées et leur apporte un sentiment de puissance

Jusqu’à récemment, l’idée d’accorder une attention particulière au style des femmes d’âge mûr aurait suscité, au mieux, un vague intérêt de la part des autres consommateurs et de l’industrie de la mode, mais elle aurait été, plus probablement, tout simplement ignorée.

Après tout, pour être à la mode et féminine, il faut généralement être jeune, non ? Qu’est-ce que les femmes plus âgées pourraient bien nous apprendre sur l’élégance ?

Dans la foulée de la popularité inattendue de ce qu’on a appelé le phénomène « advanced style », les discussions sur l’âgisme, le genre et la mode ont attiré l’attention de médias populaires, notamment du New York Times.Le compte Instagram @advancedstyle, créé en 2008 par Ari Seth Cohen, photographe américain de style de rue, a contribué à alimenter ces discussions essentielles.

La célébration par Cohen des styles personnels de femmes ordinaires de 50 ans et plus a lancé un mouvement de consommation qui est en plein essor.

Plus de dix ans après sa création, le compte Instagram Advanced Style recense plus de 300 000 abonnés, a un mot-clic (#advancedstyle) qui a été utilisé plus de 205 000 fois, apparaît régulièrement dans les grands magazines de mode du monde entier, comme Vogue Australie, et a gagné le domaine des livres-cadeaux en 2012 et en 2016, ainsi que celui des livres à colorier pour adultes.

Il existe même un long métrage documentaire consacré au « style avancé » :

La bande-annonce du documentaire Advanced Style sur Moviefone.

À la lumière de cette réussite dans les médias sociaux, ma collègue Marie-Agnès Parmentier, de HEC Montréal et moi avons décidé d’explorer comment les femmes de plus de 50 ans font entendre leur voix et évoluer leur représentation dans les secteurs de la mode et de la beauté en devenant des influenceuses officielles sur Instagram.

L’étude

Pour ce faire, nous avons mené une enquête médiatique et netnographique sur ce mouvement et ses influenceuses Instagram. Nous avons suivi 10 influenceuses populaires du style avancé à partir de nos comptes Instagram personnels pendant 12 mois.

Cette observation en ligne, qui constitue une part importante de la recherche netnographique, nous a permis d’acquérir une expérience directe des activités publicitaires des influenceuses et des interactions avec leurs fans.

On peut trouver notre étude complète en ligne dans un numéro spécial du Journal of the Association for Consumer Research consacré au genre, aux marchés et aux consommateurs. Globalement, nous avons constaté que les dix influenceuses d’Advanced Style utilisent les médias sociaux pour lutter contre l’âgisme genré qui sévit dans les secteurs de la mode et de la beauté.

Une femme âgée portant un trench-coat, un foulard coloré et un foulard de tête
Les femmes âgées défient les normes de beauté sexistes et âgistes. (Advances Style Facebook page)

Plus précisément, ces femmes incarnent deux formes de résistance inspirées par le discours occidental dominant sur ce que c’est que bien vieillir : elles déconstruisent la mode genrée et âgiste, et défient les normes de beauté.

Le vieillissement réussi ne fait pas seulement de l’inévitable détérioration biologique un projet personnel, il fournit également des stratégies concrètes pour mieux vieillir. En 1997, le médecin américain John W. Rowe et son collègue psychologue Robert L. Kahn ont défini le « bien vieillir » comme étant, avant tout, « l’évitement de la maladie et de l’invalidité, le maintien d’une bonne fonction physique et cognitive et l’engagement soutenu dans des activités sociales et productives ».

Âgisme genré dans la mode

Le marché de la mode, qui est bourré de règles discriminatoires sur ce qu’on doit porter et surtout ce qu’on ne doit pas porter lorsqu’on est une femme de 50 ans et plus, rend l’engagement durable difficile. Ces règles demandent notamment de ne plus montrer son corps en évitant les vêtements moulants, courts ou décolletés, d’adopter une garde-robe et un maquillage sobres et de proscrire les styles ultramodernes et avant-gardistes.

Nous avons constaté que, en réaction à cette réalité, les consommatrices devenues influenceuses se lancent dans un « militantisme de la mode » en ligne, exigeant des créateurs qu’ils créent du prêt-à-porter adapté à leur corps en transformation.

Dans le domaine du marketing d’influence, ce militantisme consiste également à choisir les marques que l’on souhaite promouvoir et avec lesquelles on veut collaborer, et celles qu’on préfère éviter. Les influenceuses refusent généralement d’être « la vieille de service » d’une campagne publicitaire.

Âgisme genré dans l’industrie de la beauté

La majorité des influenceuses du style avancé rejettent également l’industrie de la beauté anti-âge qui transforme le vieillissement en maladie. Cette industrie, qui se chiffre en milliards de dollars, entretient le faux espoir qu’on peut trouver la jeunesse éternelle dans un pot.

Helen Mirren dans un costume sombre avec des boutons dorés et des bottes à talons aiguilles
L’actrice Helen Mirren pose pour les photographes lors du 70efestival international du film de Berlin, en février 2020. (AP Photo/Markus Schreiber)

Nous avons constaté que ces femmes choisissent de rendre les cheveux grisonnants naturels, les rides et les cicatrices à la mode grâce à leurs publications Instagram. Cela fait des lustres que les marques de cosmétiques disent aux femmes d’un certain âge que les cheveux grisonnants sont un problème honteux qu’elles doivent cacher, alors que pour les hommes du même âge, on voit là une sorte de sex-appeal mature. La chevelure grise devient ainsi un élément caractéristique de la résistance de ces influenceuses qui est au cœur de leur militantisme.

Nous encourageons tout le monde à suivre le parcours militant des influenceuses de style avancé sur Instagram grâce au mot-clic #advancedstyle.

This article was originally published in English

Want to write?

Write an article and join a growing community of more than 181,800 academics and researchers from 4,938 institutions.

Register now