BNI s'intéresse aux gestionnaires émergents
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Deux observatrices de l’industrie accueillent positivement la création par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) d’un nouvel organisme d’autoréglementation (OAR) qui regroupera les fonctions de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) et de l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACFM).

Cependant, les fondations de cet OAR doivent reposer sur l’expertise et l’expérience des OAR actuels, comme l’OCRCVM, estime Carmen Crépin, retraitée et ancienne vice-présidente pour le Québec de l’OCRCVM : « C’est une très belle proposition. Je salue que la proposition soit articulée autour de la reconnaissance et de l’expertise des OAR existants. »

Or, l’énoncé de position des ACVM met beaucoup l’accent sur l’amélioration de la gouvernance et de l’indépendance du conseil d’administration, de la direction et de certains comités clés, avec la représentation de personnes spécialisées dans la défense des intérêts des consommateurs. Ces changements proposés afin d’améliorer l’indépendance ne doivent pas se faire aux dépens d’une dégradation de l’expertise au sein des structures de gouvernance.

« On reconnaît d’emblée l’indépendance, mais on a l’air de l’oublier ce qui fait la force des organisations qu’on veut créer, c’est leur souplesse, leur agilité et leur expertise. Ne la perdons pas à tous les niveaux du nouvel OAR », indique-t-elle en entrevue avec Finance et Investissement.

Selon Carmen Crépin, l’expertise et l’indépendance sont deux éléments à équilibrer pour que les décisions, les interventions et les cibles réglementaires choisies soient les bonnes : « Et ça, ce sont les gens de l’industrie qui le connaissent. Ce n’est pas parce que des gens de l’industrie sont sur le conseil d’administration [d’un régulateur] qu’ils sont nécessairement en conflit d’intérêts au niveau de leur opinion. Les conflits d’intérêts se gèrent. »

« Il faut que l’industrie continue de donner son opinion et son expertise dans les cibles et dans les risques et parfois dans les diverses approches pour régler les problèmes, les suivre », poursuit-elle.

Elle souligne que le Fonds canadien de protection des épargnants de l’OCRCVM, une initiative fort pertinente pour la protection des investisseurs et qui est bien gérée selon elle, reste une création de l’industrie elle-même.

« On dit que l’industrie est en conflit d’intérêts… L’industrie a aussi à cœur de bien servir ses clients aussi. »

Selon Carmen Crépin, on devrait garder au sein du nouvel OAR une approche d’encadrement basée sur les risques. « Ça amène de la souplesse et des occasions de discuter avec l’industrie : “Est-ce qu’on voit les risques à la même place?” Si on ne voit pas les risques à la même place, il y a une discussion à avoir. »

Par ailleurs, elle salue que les ACVM envisagent d’intégrer au nouvel OAR la surveillance des courtiers sur les marchés dispensés. « Bravo et enfin! » dit-elle.

En effet, depuis la naissance de cette catégorie d’inscription, elle se questionne quant aux conséquences des disparités réglementaires entre les firmes encadrées par l’OCRCVM et les courtiers du marché dispensé.

« La cohérence et l’équité entre les intervenants sur le marché, c’est important. S’il y en a un qui a des exigences règlementaires plus élevés, ça va lui couter plus cher de conformité. Et il est en compétition avec quelqu’un à qui ça va coûter moins cher de conformité », illustre Carmen Crépin.

Pour la mise en place du nouvel OAR, elle espère « une collaboration des ACVM avec le nouvel OAR et des ACVM entre elles. « L’ouverture et la coopération, ça va avec le fait de respecter leur expertise et écouter leurs propositions par rapport à prendre une approche de dicter (sa position). Dans mon expérience, ça n’a pas toujours été là. »

Beaucoup de travail

La mise en place du nouvel OAR prévu par les ACVM sera un grand chantier pour les autorités réglementaires canadiennes. « Il reste encore beaucoup de travail à faire dans ce dossier et l’ACCVM continuera de contribuer au processus de mise en œuvre », indique Annie Sinigagliese, directrice générale, relations gouvernementales et région du Québec, à l’Association canadienne du commerce des valeurs mobilières (ACCVM).

« Les firmes de courtage québécoises approuvent le regroupement des fonctions exercées par l’OCRCVM et l’ACFM. Selon les firmes, la réflexion sur la consolidation des OAR réalisée par l’Autorité des marchés financiers (AMF), les ACVM, les membres de l’industrie et par les investisseurs a été bénéfique », note-elle.

Selon elle, les firmes membres de l’ACCVM soulignent notamment que les intérêts des investisseurs ont été mis en avant-plan par l’AMF et les ACVM puisque cette décision devrait entre autres permettre à plus d’investisseurs d’avoir accès aux conseils financiers. « De plus, cette nouvelle structure réglementaire devrait simplifier les processus administratifs et diminuer les coûts opérationnels des firmes de courtage », prévoit-elle.