Le gouvernement du Québec a reçu un nombre sans précédent de recommandations. En tout, 317 mémoires ont été déposés dans le cadre des consultations prébudgétaires cette année. La Presse vous présente cinq idées tirées de cet exercice.

Cesser de subventionner Google

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L’aide généreuse du gouvernement québécois au secteur du multimédia a fait naître une industrie dynamique. Il est temps que cette aide soit redirigée vers les entreprises québécoises plutôt que de profiter aux entreprises étrangères qui paient leurs impôts ailleurs, suggère la section québécoise du Conseil canadien des innovateurs, qui regroupe des entreprises du secteur technologique, dont Coveo, LeddarTech et Lighspeed.

L’objectif de création d’emplois ne peut plus justifier le crédit d’impôt à la production de titres multimédias et le crédit d’impôt aux affaires électroniques, plaident ces entrepreneurs. Le talent se fait de plus en plus rare et les crédits d’impôt, qui sont remboursables, ne servent plus à augmenter l’effectif. Ils rappellent qu’entre 2001 et 2016, le nombre d’emplois dans le secteur des TI a augmenté de 12 % tandis que les dépenses en crédits d’impôt ont bondi de 340 %.

Leur suggestion au ministre : rendre non remboursables ces deux crédits d’impôt pour les entreprises étrangères et les bonifier pour les entreprises établies au Québec.

Des voitures en otages

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Le garage du coin est en danger et la liberté du propriétaire d’une voiture de choisir son garagiste l’est aussi, prévient l’Association de l’industrie automobile du Canada, qui regroupe ceux qui réparent et assurent l’entretien des véhicules automobiles.

Les voitures changent et deviennent de plus en plus comme des ordinateurs dont les données sont protégées par les constructeurs, expliquent les garagistes dans leur mémoire. Sans l’accès à ces données, les garagistes ne pourront plus les réparer et les entretenir. Ces informations privilégiées serviront aux constructeurs pour orienter les propriétaires vers les pièces d’origine et les concessionnaires de leur réseau, au détriment des garages indépendants. Les enjeux sont importants pour ces entreprises, mais aussi pour les automobilistes qui pourraient payer plus cher la réparation et l’entretien de leurs véhicules. Au Québec, ce sont 4,5 milliards de dépenses et 91 000 emplois qui en dépendent.

Les garagistes demandent au gouvernement une réglementation pour obliger les constructeurs à donner un accès libre aux données informatiques des véhicules automobiles à leurs propriétaires afin que ces derniers puissent choisir eux-mêmes l’établissement qui réparera et entretiendra leurs voitures.

Manger aux frais de l’État

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Les restaurants et les bars sont les commerces qui ont le plus souffert pendant les deux dernières années, en raison de la pandémie. L’Association Restauration Québec, qui compte 5000 membres dans toutes les régions de la province, a commencé à compter les victimes. Elle constate une réduction de 3200 permis de restaurants entre février 2020 et janvier 2022. Pour se remettre sur pied, le secteur de la restauration veut de l’aide, notamment pour créer une place de marché virtuelle 100 % québécoise qui serait l’équivalent des Uber Eats, SkipTheDishes et DoorDash.

Les restaurateurs réclament aussi le retour d’une mesure qui était très contestée à une certaine époque, soit la possibilité pour les entreprises de déduire à 100 % le coût des repas au restaurant avec leurs clients. Il s’agit d’une mesure qui aiderait aussi les centres-villes à reprendre vie, plaident les restaurateurs. Cette déduction fiscale a été réduite de 100 % à 50 % et l’ARQ réclame son rétablissement à 100 %.

En 2021, la déduction à 50 % des frais de repas et de divertissement a coûté 76,4 millions au gouvernement.

Un plan pour la dette

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

La réduction de la dette est un objectif que le Québec s’est donné depuis des années pour ne pas faire supporter aux prochaines générations les dépenses du passé. C’est d’ailleurs à cette fin qu’a été créé le Fonds des générations en 2006. Alimenté par les redevances hydrauliques et minières, le fonds aura accumulé 15,5 milliards au 31 mars 2022. La meilleure façon de réduire la dette accumulée fait l’objet de discussions sans fin et il est temps de se donner un plan, proposent l’Institut du Québec et l’Association des économistes du Québec.

Ils demandent au gouvernement de se donner l’obligation de fixer une cible d’endettement à atteindre. Cette cible viserait à ramener la dette à la moyenne des autres provinces canadiennes, en tenant compte du coût de la dette et de l’état des finances publiques.

Les économistes de l’IDQ et de l’ASDQ suggèrent qu’une fois l’objectif atteint, le Fonds des générations soit utilisé pour aider les prochaines générations à faire face aux défis environnementaux, notamment en adaptant les infrastructures publiques aux changements climatiques.

Sauver le transport collectif

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Le métro de Montréal, quasi vide lors du premier confinement, en avril 2020

Alliance Transit, large coalition d’organisations de tout horizon, est très inquiète de l’avenir du transport collectif au Québec. Même si de grands projets comme celui du REM font les manchettes, il reste que le transport collectif est très fragilisé par la pandémie, souligne le mémoire soumis au ministre des Finances. En comparaison de l’Ontario, qui prévoit consacrer 74 % de ses investissements en transport au transport collectif au cours des 10 prochaines années, le Québec y consacre seulement 31 % de ses investissements en transport, la part du lion allant toujours au réseau routier.

Les revenus de taxes sur les carburants, qui sont la principale source de financement des transports en commun, n’augmentent plus. En fait, cette source de financement tend à diminuer depuis 2019, et avec la popularité des voitures électriques, elle pourrait se tarir, craint le regroupement. À partir de 2035, la vente de voitures neuves à essence sera interdite au Québec, si bien qu’il est urgent de trouver d’autres solutions pour le financement du transport collectif.

Transit demande au gouvernement de tester, au moyen d’un projet pilote, le remplacement de la taxe sur l’essence par une tarification au kilomètre parcouru pour envisager le remplacement de la taxe sur l’essence d’ici 5 à 10 ans.