Bretagne. La biofumigation, une solution naturelle pour lutter contre le taupin

Les solutions chimiques ont été interdites les unes après les autres. En Bretagne, pour lutter contre le taupin, les producteurs de pommes de terre testent de nouvelles pratiques

Dolo Goupille
Philippe Dolo, responsable de l'expérimentation à Bretagne plants, et Cécile Goupille, conseillère agronomie-grandes cultures à la chambre d'agriculture. ©Chantal Pape
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S’il fait aussi des dégâts sur céréales ou maïs, le taupin est devenu un fléau pour certains producteurs de pommes de terre, qui voient leurs tubercules percés de multiples trous à la récolte et invendables. Les solutions chimiques qu’ils avaient à disposition ayant été interdites les unes après les autres, les essais se multiplient, pour tenter de trouver une solution.

Des essais peu concluants

« Les produits de biocontrôle, extraits végétaux, champignons ou bactéries ? En 7-8 ans, on a dû faire une cinquantaine d’essais », relate Philippe Dolo, responsable de l’expérimentation à Bretagne plants. « L’efficacité varie de 0 à 25 % ».

Pour détruire le taupin, des essais ont aussi porté sur une succession de déchaumages pendant l’été. « L’idée est d’en réaliser 4 ou 5, pour que les larves sèchent au soleil ». L’efficacité varie alors de 25 à 40 %, « à condition d’avoir 3 à 4 jours de beau temps à suivre ».

Mais la terre est asséchée, « et ce qu’on va gagner sur le taupin, on va le perdre en biomasse pour le couvert végétal qui va suivre ». D’autres essais combinent 2 ou 3 déchaumages, suivis de l’implantation d’un couvert de moutarde brune, répulsif pour le taupin. « Là, l’efficacité peut grimper jusqu’à 50 % ». Et la réflexion peut s’étendre à la rotation, en multipliant les couverts de moutarde brune.

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Broyés finement

Cette année, en partenariat avec la chambre d’agriculture, un essai sur la biofumigation est en cours à Saint-Thégonnec. « Une fois enfouis dans le sol, des engrais verts, riches en glucosinolates, vont libérer des molécules biocides, isothio et thiocyanates, volatils et toxiques, afin de réduire les pathogènes, les ravageurs et les adventices du sol », explique Cécile Goupille. Une méthode qui permettrait aussi de lutter contre les taupins, mais les conditions à respecter sont nombreuses pour qu’elle soit efficace. « Les couverts, principalement des crucifères, doivent être en pleine floraison, stade où la teneur en glucosinolates est maximale, au moment de la destruction », détaille la conseillère agronomie-grandes cultures à la chambre d’agriculture. « La végétation doit être broyée le plus finement possible, pour casser les cellules. L’incorporation, sur 15 à 20 cm, doit être immédiate après broyage, ce qui nécessite deux tracteurs à se suivre ». Le sol doit ensuite être roulé, pour enfermer le gaz pendant deux semaines.

Comme une culture

Pour les besoins de l’essai, deux dates de semis ont été retenues, le 2 septembre, « mais nous avions peur que la moutarde ne fleurisse avant l’entrée de l’hiver », et le 17 septembre. Trois variétés ont été semées en pur, Étamine, précoce, Vittasso et une moutarde d’Abyssinie, tardives. Et des mélanges ont aussi été réalisés, radis, phacélie, moutarde brune et trèfle d’Alexandrie, avoine diploïde, phacélie et moutarde Vittasso.

Sur l’essai mis en place, les couverts sont peu développés en sortie d’hiver et seule la moutarde Vittasso dépasse une biomasse de 2 t de matière sèche à l’hectare. « Pour être plus efficaces, les couverts devraient recevoir une fertilisation », plaide Philippe Dolo. Une pratique aujourd’hui interdite. « Mais 80 cm de végétation au-dessus du sol, ce sont 80 cm de racines, qui vont aller pomper efficacement l’azote du sol, ce que ne fera pas un couvert faiblement développé ».

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A prévoir à l’avance

couvert moutarde
Une fois en fleurs, ce couvert de moutarde sera broyé finement et incorporé au sol, pour lutter contre les taupins. ©Chantal Pape

Contrairement aux craintes, la moutarde Vittasso n’est toujours pas en bouton floral début mars. « Peut-être aurait-il fallu la semer plus tôt, la broyer en octobre et implanter un autre couvert pour passer l’hiver », s’interroge Philippe Dolo. « Mais il faut aussi que les taupins soient remontés quand on enfouit le couvert ».

Efficace sur les œufs ou les jeunes larves, cette technique l’est beaucoup moins sur les taupins les plus âgés. « Dans la rotation, il faudrait sans doute mettre en place cette biofumigation 2 à 3 ans avant la culture de pomme de terre, pour assainir la parcelle ». Les questions restent encore nombreuses. Rendez-vous en fin d’été pour les premiers résultats, au moment de l’arrachage des pommes de terre.

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